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Mobilité Internationale à El Alto - Bolivie

Je suis à El Alto, à 4000m d'altitude, internet ne fonctionne pas très bien, voire même des fois pas du tout, car pour le moment je suis hébergée dans le centre où je suis en stage et je cherche un appartement à La Paz (un peu plus bas et mieux desservie en réseau).
Ceci étant dit, l'acclimatation se fait petit à petit. Je suis en stage dans une ONG, créée par un français, qui s'appelle « Enda El Alto » et qui a pour objectif de diagnostiquer les problématiques du territoire d'El Alto et de proposer divers axes d'actions. La ville d'El Alto a été créée suite à un exode rural massif à La Paz. Historiquement c'était seulement un quartier très pauvre de La Paz mais aujourd'hui (depuis 1984) c'est une ville qui compte plus d'habitants que La Paz (environ 1 million). Son histoire est encore d'actualité, car même si El Alto est en constante évolution, il y a encore peu d'infrastructures, beaucoup de rues et d'habitations ne sont pas finies et il y a également beaucoup de violences.
 
 
L'ONG a diagnostiqué sur ce territoire une grande violence familiale notamment envers les femmes et surtout les filles et adolescentes. Ce pourquoi ont été créés 2 centres appelées « communautés thérapeutiques » :
- La casa fraternidad pour les filles et les adolescentes qui sont parties de leur famille et vivent dans la rue et/ou ont des problèmes d'addiction et/ou de "conduite".
- La casa Minka pour les filles et adolescentes victimes de violences.
 
La première semaine, j'ai donc visité les 2 centres. Ayant plus de besoins humains sur la casa Minka, je serai donc à temps plein (8h30 -18h30 du Lundi au vendredi) sur celle-ci. J'ai donc pu, depuis ces deux semaines, y observer certaines pratiques éducatives et thérapeutiques. En effet, les centres s'appuient sur une approche communautaire : des temps sont prévus (1 réunion par jour + 1 assemblée générale par semaine) pour qu'elles s'appuient entre elles, se conseillent sur leurs problématiques communes et individuelles et jugent les actes des autres, elles ont également toutes à leur arrivée une « sœur de communauté ».
De plus, ce sont elles qui s'occupent de la maison (ménage, cuisine). Il y a alors un planning des tâches ménagères (pour le matin, après manger et le soir), cela leurs prend énormément de temps ! Et si elles refusent de les faire, elles en ont encore plus à faire (ce qui s'appelle ici « experencias educativas »).
Le rôle de l'éducatrice de jour est donc premièrement, de vérifier que les filles vont bien aux activités et font bien leurs tâches ménagères. J'ai un peu de mal à me retrouver dans ce rôle car il y a beaucoup de punitif et d'obligations basés sur un jugement moral. J'essaie donc de motiver les filles par d'autres moyens que la punition ou la menace de punition.
Il y a cependant des avantages pour moi dans cette approche communautaire, notamment sur l’approche de l'individu, qui est clairement appuyé. Ici le collectif est vu comme porteur de l'individu. Je trouve cette approche très intéressante et différente de ce que j’ai pu voir durant mes stages en France.
J'ai l'impression que le regard des professionnels sur les filles est certes assez exigeant à mon avis mais très positif. Elles (car il ne s'agit que de femmes à part le directeur) voient plus les potentialités de chacune et les appuient en ce sens : la philosophie du lieu pourrait se résumer à "Une autre vie est possible et cela ne dépend que de toi". Beaucoup de phrases dans ce sens sont d'ailleurs écrites partout dans le centre.  
J'essaie de questionner de plus en plus les professionnels sur leur travail, le lieu, car maintenant je commence à acquérir le niveau nécessaire en espagnol pour le faire et l'équipe est ouverte à mes questions. J'ai aussi l'appui de volontaires français pour demander des informations même s'ils sont dans des fonctions de recherches de fonds, de communication pour l'ONG et non quotidiennement avec les professionnels dits "tecnico" et les filles.
 
Mon rôle de stagiaire est de suivre les filles au quotidien pour vérifier que la journée se passe bien, assurer les accompagnements extérieurs (médecins…) et également plusieurs ateliers (débats, ludothèque, expression des sentiments). 
 
Du point de vue politique, tout est différent. Il y a beaucoup de "propagande" pour le président actuel (Evo Morales). Par exemple, sur beaucoup de murs sont tagués "avec Evo la bolivie va bien". Il a également fait une chanson pour sa dernière campagne que j'ai entendu pour la première fois dans une pena (lieu du soir typiquement pacenien (de La Paz) qui passe exclusivement des musiques folkloriques boliviennes). Tout le monde a chanté une chanson où le refrain se résume à « Evo, Evo te quiero (je t'aime) ». Pourtant, j'ai entendu beaucoup de discours qui n'étaient pas forcément d'accord avec sa nouvelle politique.
 
En ce qui concerne la place des femmes, c’est très compliqué car en pleine évolution. J'ai notamment pu rencontrer un centre de santé spécialisé dans la santé sexuelle et reproductive, qui a pour but également de prévenir sur les contraceptifs possibles et la violence faite aux femmes. Elles m'ont notamment expliqué que ces sensibilisations étaient compliquées dans une société bolivienne encore très machiste mais possible car beaucoup d'initiatives de ce type, initiées par des boliviennes, émergent de plus en plus. D’autant que l'Etat a engagé des directives en ce sens, avec une campagne de sensibilisation sur la violence faite aux femmes, très visible dans La Paz.
 
C'est très difficile de tout expliquer car il y aurait beaucoup plus de choses à dire de ces deux semaines.
Sinon je me suis bien acclimatée à l'altitude, à l'eau non potable, à la nourriture, à la langue et je commence à m'habituer aux transports boliviens qui sont très variés mais tous très pressés. Pour le moment, les différences culturelles avec les personnes que j'ai rencontrées sont perceptibles mais ne mettent pas en difficulté la communication et les relations.
 
Bonne semaine et à bientôt,
Sophie